Quand « Cyrano de Bergerac  » faillit être un désastre

Quand “Cyrano de Bergerac” faillit être un désastre… avant de devenir un triomphe !

Le 28 décembre 1897, la salle de la Porte Saint-Martin à Paris est comble. Le public trépigne d’impatience : on va découvrir une nouvelle pièce d’un certain Edmond Rostand, encore peu connu, intitulée Cyrano de Bergerac. L’auteur, lui, est terrorisé.

Une veille de première sous tension

Depuis des semaines, Rostand répète dans une fièvre nerveuse. Il craint que sa pièce soit trop longue, trop littéraire, trop audacieuse. Les comédiens eux-mêmes doutent : Constant Coquelin, immense acteur de l’époque, joue Cyrano, mais il redoute que le public s’impatiente. Rostand, blême, murmure à sa femme avant le lever du rideau :

“Ce soir, c’est le bide ou la gloire.”

Un silence… puis un ouragan d’applaudissements

La pièce commence. Quelques rires polis, un murmure dans la salle. Puis, soudain, quelque chose se passe. Les tirades enflammées de Cyrano, ses mots d’esprit, sa noblesse blessée — tout cela emporte le public. À la tirade du nez, la salle explose de rires. À la scène du balcon, elle retient son souffle.
Et à la fin… vingt minutes d’applaudissements ininterrompus.

Rostand, en larmes, est porté sur scène. Coquelin le prend dans ses bras. La légende raconte qu’il murmura à son comédien :

“Ah ! Si seulement j’étais mort hier soir, j’aurais connu le bonheur parfait !”

De la peur au mythe

Cyrano de Bergerac deviendra l’un des plus grands succès de l’histoire du théâtre français. Et cette première, que son auteur redoutait tant, reste l’un des symboles de cette magie propre au théâtre : rien n’est jamais joué d’avance. Ce soir-là, en quelques heures, un homme anxieux est devenu un mythe — et un personnage est entré à jamais dans nos mémoires.

Le théâtre, c’est aussi cela : des hasards, des failles, des coups de génie et des émotions brutes. L’échec redouté peut, parfois, devenir l’instant où tout bascule.